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La décennie de toutes les tristesses

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Par la rédaction

Ils s’en iront. C’est presqu’une certitude. Ils nous manqueront. Et tout sera dépeuplé… Ils sont des démiurges, des patriarches avant la lettre, des illuminés, bref, des phénomènes. Ils sont ces êtres supérieurs dont on dit depuis plus de dix ans qu’ils viennent d’une autre planète et qu’ils gardent jalousement le secret de la galvanisation de la passion et du fanatisme humains. La simple évocation de leurs noms fait épancher des émotions de toutes les couleurs qui révèlent la part d’irrationnel qui a toujours habité le monde et qui l’habite encore aujourd’hui.

La juridiction de leur aura n’est assignée à aucune résidence. Leurs conquêtes de coeur ne souffrent d’aucun préjugé de classe, de couleur, d’extraction sociale, d’aucun bémol lié à la richesse du patrimoine. Au rythme de leur hégémonie vibrent les coeurs tant de l’Amérique enrichie que de l’Afrique appauvrie, tant des mégapoles européennes que des petits villages d’Haïti. Ces héros semblent transcender tous les particularismes religieux, politiques, culturels, idéologiques au point d’être des figures emblématiques de la globalisation et de l’économie-monde. Ils s’appellent Lionel Messi, Cristiano Ronaldo, LeBron James, Serena Williams, Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic.

Ils ne sont pas seulement des sportifs. Ils sont une part de nous-mêmes. Ils nous ont tant fait rêver qu’il nous est douloureux d’accepter l’implaccabilité des lois naturelles en ce qui les concerne. Pourtant, malgré leur apparente provenance extraterrestre, ils demeurent avant tout des humains appelés comme nous à succomber au verdict de la biologie, à se retirer du champ de bataille, pour se réfugier dans le repos du guerrier. Parfois, contre leur gré, contre leur cœur, mais quand le corps n’y est plus, tout devient fade et le monde, sanglotant de mélancolie, ne peut qu’égrener le chapelet de leurs records.

S’agissant de La Pulga, de CR7, du King, de Mommy Smash, de Rodge, d’El Matador et de Djoker, la terre de leur carrière n’a pas encore achevé sa gravitation autour du soleil de leur sport respectif. Cependant, ils prennent de l’âge et des signes de fébrilité arrivent à pas feutrés. Lentement, mais sûrement. Ce qui légitimise toute anticipation, quoique douloureuse, sur leur probable retraite au cours de la décennie 2020-2029. Et eu égard à la grandeur de leur héritage sans précédent, leur chute s’apparentera à des funérailles transnationales tant le torrent des larmes versées à l’échelle planétaire sera impétueux. Rien qu’en y pensant, la décennie est déjà triste.

Lionel Messi et Cristiano Ronaldo

La Pulga et CR7 ont engrangé des records stratosphériques durant plus de dix ans, tenant la dragée haute à tous leurs compétiteurs. Crédité de 6 ballons d’or, Leo Messi n’a dû attendre que la saison précédente pour accuser une légère avance sur son éternel rival Cristiano Ronaldo qui peut, quant à lui, se targuer d’en avoir glané 5. Ce duel des titans s’est joué et se joue encore sur tous les terrains entre ces gladiateurs du rectangle vert. Messi, c’est le meilleur buteur de tous les temps du Barça, tout comme CR7 est le meilleur buteur de la plus prestigieuse des compétitions européennes en nombre de buts marqués. Jamais deux footballeurs n’ont autant trusté tous les records individuels au cours d’une décennie. Au banquet des trophées, ils n’ont laissé que des miettes à leurs adversaires et, au panthéon des immortels, ils ravissent des places prestigieuses à bien des devanciers. La dictature de leurs talents inégalés ne connaît pas de limites. Aujourd’hui encore, ils semblent toujours vouloir s’accrocher au trône. Mais s’ils paraissent inusables, impérissables, éternels, La Pulga et Cr7, âgés respectivement de 32 et 34 ans, devront vraisemblablement raccrocher les crampons avant 2030. Si cette hypothèse est amère, il n’en demeure pas moins qu’il serait encore plus douloureux de s’enfermer dans le déni.

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LeBron James

L’enfant de l’Ohio, 35 ans, a battu presque tous les records de la balle orange. Trois fois champion NBA, trois fois MVP des finales, quatre fois MVP en saison régulière, le “Chosen One” est le 3e meilleur scoreur de tous les temps, derrière Kobe Bryant et Kareem Abdul-Jabbar. LeBron James, dont la longétivité dans la grande ligue est effarante, est également le meilleur scoreur de tous les temps en playoffs. Sans aucun doute, il est déjà l’un des meilleurs joueurs de tous les temps et le meilleur joueur de sa génération. Cette saison, en plus d’être le visage de la NBA depuis des années, il est bien lancé dans la quête d’un nouveau titre avec les Lakers de Los Angeles. Mais qu’à cela ne tienne, il n’a plus la même agilité, ce qui laisse présager sa retraite imminente. Le poids de l’âge commence à se faire sentir. Pas sûr de le voir sur le parquet au-delà de 2029, sans vouloir être devin. Il s’apprêtera donc à laisser dans la tristesse des millions de fans un peu partout à travers le monde. Ainsi va la vie. Et la tristesse avec…

Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic

Joueur élégant sur le court, Roger Federer est l’un des “tennisman” les plus dominants depuis des années sur le circuit. Le Suisse a glané vingt titres de Grands Chelems. Depuis son premier titre à Milan en 2001, il n’a cessé d’éblouir le monde du Tennis par sa classe et son talent. Si Federer c’est 6 Open d’Australie, 1 Roland Garros, 8 Wimbledon, 5 Us Open, Rafael Nadal, son plus grand compétiteur ces dix dernières années, compte 1 Open d’Australie, 12 Roland Garros, 2 Wimbledon, 4 Us Open. Le Majorquin, qui détient une frappe de balle hors du commun, s’est révélé redoutable en terre battue. Le Matador, qui se blesse régulièrement depuis trois ans, n’est pas à l’orée de ses heures de gloire. Quant à Novak Djokovic, lui, il a su gagner 17 grands Chelems. Si personne n’est parvenue à tenir tête aux deux monstres du football Mondial, Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, le Serbe, lui, qui allie qualité physique et souplesse dans son jeu, a su se tailler une place de choix entre les deux mastodontes du Tennis. Mais le temps semble triste. Le moment fatidique n’est pas trop loin. Âgés respectivement de 38 ans, 33 ans et 32 ans, Federer, Nadal et Djokovic risquent de ne pas traverser la décennie.

Serena Williams

L’ombre de son talent plane sur toute une génération. Dès l’âge de 19 ans, elle a gagné son premier titre, annonciateur d’une longue aventure ponctuée de succès époustouflants. Avec 7 Open d’Australie, 3 Roland Garros, 7 Wimbledon et 6 Us Open dans son escarcelle, elle a laissé son empreinte indélébile sur tous les courts de tennis. À 38 ans, si elle n’est pas encore l’ombre d’elle-même, elle ne témoigne plus aujourd’hui de la même vigueur. Elle est désormais chancelante. La citadelle de ses performances physiques semble ne plus être inexpugnable. Désormais 9e au classement mondial du tennis féminin, elle est sur une pente descendante, ce qui augure sa retraite avant la prochaine décennie.

Les sports sont nombreux. Les joueurs en fin de cycle aussi. Mais il a fallu faire des choix pour mieux admirer les talents de ces athlètes qui devraient abandonner la course au cours de cette décennie et comprendre, du coup, l’immensité du voile de tristesse qui s’abattra sur la planète. Bien sûr que d’autres étoiles poindront au firmament. De nouveaux guerriers devraient investir le ring pour provoquer le déchaînement de passions, d’autant que la nature a l’horreur du vide. Mais le monde ne sera plus jamais le même sans ces cracks que sont LeBron James, Leo Messi, CR7, Nadal, Federer, Djokovic, et Serena. Les plus belles poésies ont toujours une fin. Par les temps qui courent, profitons allègrement des moindres minutes dont ces génies sublimes nous gratifient aujourd’hui encore avant le retentissement de la trompette funeste de la retraite…


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