Mon. May 20th, 2024

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Daniel Foote: «Les interventions politiques internationales en Haïti ont constamment produit des résultats catastrophiques»

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C’est la nouvelle du jour en Haïti. Daniel Foote, l’envoyé spécial des États-Unis en Haïti, jette l’éponge. Le diplomate, qui s’est fendu d’une lettre cinglante au secrétaire d’État Américain, s’insurge face aux traitements inhumains infligés au migrants haïtiens par l’administration de Joe Biden. Daniel Foote, sans langue de bois, brosse un sombre tableau de l’intrusion infructueuse des ambassades étrangères dans les affaires haïtiennes. Il n’aura pas réussi à aider Haïti à sortir de la crise politique qui s’envenime. «Notre approche politique envers Haïti reste profondément imparfaite, et mes recommandations ont été ignorées et rejetées» Ce n’est pas la première fois qu’un haut diplomate constate l’échec de la communauté internationale en Haïti. Port-au-Prince Post se fait le devoir de publier in extenso une version française de la lettre de démission de Monsieur Foote. Pour l’histoire et la vérité.

Avec une profonde déception et mes excuses à ceux qui recherchent des changements cruciaux, je démissionne de mon poste d’Envoyé spécial pour Haïti, avec effet immédiat. Je ne serai pas associé à la décision inhumaine et contre-productive des États-Unis d’expulser des milliers de réfugiés haïtiens et d’immigrants illégaux vers Haïti, un pays où les responsables américains sont confinés dans des complexes sécurisés en raison du danger que représentent les gangs armés qui contrôlent de la vie quotidienne. Notre approche politique envers Haïti reste profondément imparfaite, et mes recommandations ont été ignorées et rejetées, lorsqu’elles n’ont pas été modifiées pour projeter un récit différent du mien.

Le peuple d’Haïti, embourbé dans la pauvreté, otage de la terreur, des enlèvements, des vols et des massacres de gangs armés et souffrant sous un gouvernement corrompu avec des alliances de gangs, ne peut tout simplement pas supporter l’intrusion forcée de milliers de migrants de retour sans nourriture, sans abri et sans argent. Une tragédie humaine supplémentaire évitable. L’État effondré est incapable d’assurer la sécurité ou les services de base, et davantage de réfugiés alimenteront le désespoir et la criminalité. L’afflux migratoire vers nos frontières ne fera qu’augmenter à mesure que nous ajouterons à la misère inacceptable d’Haïti.

Les Haïtiens ont besoin d’une aide immédiate pour rétablir la capacité du gouvernement à neutraliser les gangs et rétablir l’ordre par le biais de la Police nationale. Ils ont besoin d’un véritable accord entre la société et les acteurs politiques, avec un soutien international, pour tracer une voie opportune vers la sélection démocratique de leur prochain président et parlement. Ils ont besoin d’une aide humanitaire, d’argent pour livrer les vaccins Covid et de tant d’autres choses.

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Mais ce que nos amis haïtiens veulent vraiment, et ce dont ils ont besoin, c’est l’opportunité de tracer leur propre voie, sans marionnettes internationales et sans candidats privilégiés mais avec un véritable soutien pour cela. Je ne crois pas qu’Haïti puisse jouir de la stabilité tant que ses citoyens n’auront pas la dignité de vraiment choisir leurs propres dirigeants de manière juste et acceptable.

La semaine dernière, les ambassades des États-Unis et d’autres à Port-au-Prince ont publié une autre déclaration publique de soutien au Premier ministre de facto non élu, le Dr Ariel Henry, en tant que chef par intérim d’Haïti, et ont continué à supporter son « accord politique » sur un autre accord plus large dirigé par la société civile. L’orgueil qui nous fait croire que nous devrions choisir le gagnant – encore une fois – est impressionnant. Ce cycle d’interventions politiques internationales en Haïti a constamment produit des résultats catastrophiques. Des impacts plus négatifs sur Haïti auront des conséquences désastreuses non seulement en Haïti, mais aux États-Unis et chez nos voisins de l’hémisphère.


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