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Coronavirus: ne faut-il pas suspendre le transport en commun en Haïti ?

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Par Juno JEAN BAPTISTE
Twitter: @junopappost

Une trentaine de personnes malades. Deux morts. Pour près de deux cent tests effectués. De la déclaration des deux premiers cas officiels de contamination (19 mars 2020) à aujourd’hui en Haïti, le Covid-19, sournois, imprévisible, mais surtout invisible, accuse une progression non-exponentielle lorsqu’on l’analyse au prisme d’autres pays de la région dont la République Dominicaine.

À défaut d’une progression officiellement vertigineuse, c’est la gestion catastrophique de la crise du coronavirus qui devrait nous effrayer. Le gouvernement patine dans les petits détails. Jusqu’ici, malgré le communiqué du MSPP annonçant le premier décès lié au Covid-19, ils sont nombreux ceux qui en doutent. La manière de communiquer n’était pas la bonne. Elle a donc ouvert la voie au scepticisme et à des spéculations sans fin.

La transparence promise ne dépasse pas le cadre de quelques communiqués annonçant de temps à autre de nouveaux cas de personnes infectées. C’est dire qu’Haïti est réellement le pays des simulacres. Ils n’ont pas voulu communiquer à la presse les centres d’isolement et ceux de mise en quarantaine. Quand ils veulent enfin communiquer, ils le font avec amateurisme; la formule pour s’y prendre n’est jusqu’ici pas bien ficelée.

Les chefs ont déclaré l’État d’urgence sanitaire. Mais à l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti, des soignants se plaignent du manque de matériel.  Des médecins résidents, des infirmières et urgentistes, payés au lance-pierre, ne sont pas prêts, du moins psychologiquement, à affronter le défi immense que pose la pandémie du coronavirus. Il n’y a pas de pont entre la parole du Premier ministre Joseph Jouthe et la réalité sur le terrain. Un leadership aussi rachitique en ces temps d’une crise sanitaire d’une telle ampleur risque de nous amener tout droit vers la catastrophe.

Dans l’Haïti au temps du coronavirus, le transport en commun continue à fonctionner. Seules les écoles, les églises et les universités sont fermées. Les Haïtiens continent à sortir en nombre, pour la plupart collés l’un sur l’autre comme des sardines dans des camionnettes de fortune. Ils semblent narguer et/ou ignorer la menace alors que le Covid-19 risque de prendre sa vitesse de croisière

dans les prochaines semaines. Ceux qui tiennent la barque ne parviennent même pas à imposer un couvre-feu. Ne leur demandez pas de faire appliquer le confinement.

Crédit image : Eugenie Marie

L’appel du gouvernement de Joseph Jouthe aux syndicats des chauffeurs et propriétaires de véhicules de transport en commun à réduire le nombre de passagers, à faire respecter la distanciation sociale, a sonné faux. Le gouvernement continue à enquiller des déclarations, des consignes alors même qu’il se révèle incapable de les faire appliquer. On dirait que le Covid-19, au cours des semaines qui s’amènent, va nous  épargner paradoxalement de ses griffes alors même que nous avions passé tout l’été à chanter.

Face aux possibilités de propagation du Covid-19 via le transport en commun en Haïti, des maires, imbus du danger, ont suspendu certains trajets dans leur ville respective (Jérémie, les Cayes etc.). Un micro-leadership qu’il faut saluer même s’il ne compense nullement l’absence d’un leadership gouvernemental en vue de contenir la menace du coronavirus et du coup rassurer la population en ces temps de grandes incertitudes.

Le ministre des Travaux publics, Transports et Communication, Jaccéus Nader, a laissé entendre la semaine écoulé qu’il devrait être en mesure de mettre sous terre 1 000 à 1 500 personnes quand la maladie atteindra son pic. La formule est peut-être prémonitoire. Le responsable d’État aurait pu assouplir son langage. Mais sa déclaration colle très bien à ce qui se passe dans le pays: beaucoup d’Haïtiens sont insouciants, sinon inconscients et la communication gouvernementale n’a pas le mérite de faire la pédagogie de la dimension de la crise.

Le Covid-19 et le transport en commun ne font pas bon ménage. Tout comme il ne fait pas bon ménage avec l’incapacité d’un gouvernement à prendre les pouls d’une crise sanitaire aussi complexe pour mieux la contrôler, à défaut de la dompter …


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