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Journal d’un confiné

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Williamson Ferdinand

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Williamson Ferdinand

Entre la propagation d’un virus qui terrasse l’humanité et le scepticisme d’un quotidien qui succombe aux assauts répétés des inquiétudes, j’essaie de tenir. Comme tout le monde, je fais corps au néant, devenant une vile cible dans le viseur d’une monstruosité invisible à l’oeil nu : le Covid-19. Sous l’effet enivrant du cosmopolitisme, j’ose prétendre être citoyen du monde. Mais, par-dessus tout, je reste singulier. Et assumer ma singularité  d’haïtien condamné à faire face à une réalité aussi implaccable donne des frissons, tant les anticipations funestes décuplent ma sécrétion d’adrénaline.

Aucun vaccin n’étant encore trouvé, le confinement semble être le meilleur moyen de se prémunir contre la maladie. Néanmoins il ne saurait faire figure de panacée tant il est anxiogène, tant sa facture psychologique est salée. Mais, qu’importe ! La mort entend imposer sa fatalité. En Haïti surtout, elle se veut impériale. Si ce n’est pas le coronavirus, ce sera la faim, et si on ne jugule pas la propagation de la couronne ensorcelée, ce sera probablement la fin.

De ce dilemme naît un mode de vie différent auquel je suis contraint de m’accommoder. Ne pas pouvoir sortir ne constitue guère mon véritable problème, habitant dans un petit village à petite colline où il y a de l’électricité, je me gave de séries, de films et de documentaires à la longue. Le plus dur c’est de me trouver face à moi même à la recherche d’un terrain d’entente au cœur d’une bataille que je dois livrer contre des réflexes innés : se gratter les yeux, toucher le nez ou la bouche. Je suis obligé de garder près de moi une bouteille de “sanitizer” comme un buveur impénitent qui ne se lasse jamais de son “gwòg”. La liberté n’est plus ! Le coronavirus s’apparente à un gouvernement mondial qui, d’un ordre supérieur aux humains, finit par assujettir ces derniers.

Dans ces moments de troubles je ne compte que sur une seule alliée : la prudence. Je me lave les mains aussi souvent que je pense, d’autant plus qu’une négligence peut s’avérer fatale même en sachant que le taux de létalité du virus n’est pas des plus élevés.

Quand arrive la nuit où dans l’interlude entre le conscient et l’inconscient je suis pris au piège du sommeil, je laisse tout au Bon Dieu, car éviter de se toucher le visage n’est plus de mon ressort.

Je peux me plaindre de tout sauf de la solitude car je vis avec ma copine qui ne cesse de me rappeller combien il est capital de ne pas s’égarer sous les brumes de l’insouciance. Même avec ces mesures, je vis avec un stress continu, tout ne dépend pas que de moi mais j’assume mon rôle, je reste chez moi. En effet je vis de peur et de paix sans déroger aux principes de prévention. Au moment de cette pandémie, le “nous mourrons tous !” de Délira Délivrance est revêtu d’une connotation amplement prémonitoire à mon sens. Que de vrais Manuel gouvernent la rosée de la recherche scientifique pour accoucher le vaccin tant attendu par l’humanité entière !


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