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Le confinement dans la peau des partenaires sexuels clandestins

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Image via Dreamstime

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J. Kendy Clermont

«Dans les brèches crépusculaires d’une nuit satellisée par une pleine lune, je m’agrippe à ses lèvres épaisses sur le perron jouxtant l’entrée de sa maison. Je l’embrasse dans une folie jamais observée, une passion persuasive. Son odeur conquistador assiège mes narines. j’ai vite décidé d’élargir mes Horizons pour prendre comme cible son entre-jambe. Je descends, et c’est pour la première fois qu’un paradis se trouve en bas […].» Cette prestidigitation poétique témoigne de la manne de douceur que représente une personne pour une autre. Imaginons une seule seconde que cette dernière ait un confinement sans elle.

Isolement, angoisse, ostracisme, autarcie, exclusion… S’il faut appréhender le concept confinement, il est important de comprendre quel état d’esprit prévaut pour chaque personne donnée. Tout le monde ne vit pas un confinement. Certains vivent une succession d’instants les uns plus angoissants que les autres tant la réalité ne leur est pas clémente. La situation pendant le confinement dépend de comment était ta situation pré-confinement. Quelle a été ta place dans la pyramide sentimentale? Est ce que ton rôle sentimental est en adéquation à ton statut de partenaire clandestin ? Ce confinement vient avilir notre inégalité dans la réalité de vie de la personne qu’on aime. Et dire, jadis considéré comme de la vantardise, que même quand je suis second(de), mais c’est moi qu’il(elle) aime ressemble beaucoup plus à un aveu d’impuissance servant de masque à une honte refoulée. Le fait est que tu n’as pas accès à toute une série de fantasme, de jeu, d’habitude. Tu ne fais que vivre une situation qui cristallise ton infériorité statutaire.

Vivre avec des flux sexuels qui sont sabotés constamment par la rétention. Pendant que certains se voient privés du moyen de s’approvisionner en produits de première nécessité, nous, on veut seulement aller faire une course dans le cœur de quelqu’un qui n’est pas officiellement nôtre. On veut seulement guetter une présence qui peut nous alimenter en vivres affectifs. On devient des laissés-pour-compte, des va-nu-pieds dans la communauté de l’amour. On vit hors de nous-mêmes, on vit dehors, non, on vit dans un autre espace de confinement qui nous enlève une kyrielle de droits.

Ces inégalités dans l’amour s’aggravent face à la mesure du confinement. Jamais, nous ne nous sentions aussi inexistants. Jamais nos sens de possessivité n’ont été autant enfouis, recroquevillés aux creux de notre égo déboussolé. On fustige l’inégalité sociale qui tue et que la Covid-19 frappe beaucoup plus ceux et celles qui la subissent(situation des Américains noirs aux USA), mais on passe sous silence ces gens qui s’accrochent à une personne sans pouvoir se tailler une place à la hauteur de ce qu’elles ressentent dans la vie de cette dernière au cours de cette période. Pis, aucun organisme de droits sentimentaux n’intervient pour mettre en exergue ces inégalités qui rongent le cœur.

Il y a aussi une réactivation intensive de l’ethos de la jalousie. On n’arrive pas à gober l’idée que notre dulcinée soit entre les mains de quelqu’un d’autre, même quand celui-ci nous précède dans sa vie. Avec un zeste de mauvaise foi qui nous ménage une aise psychologique, parfois on souhaite que ça se détériore dans leur foyer, question simplement de se donner le satisfecit qu’ils n’auront pas à baiser. Que l’individu ne touche pas ce corps sur lequel je pratique toutes sortes d’acrobaties avec ma langue. Mais tout n’est que souhait, on ne fait qu’inventer des idées enclines à compenser le vide.

Pendant ce confinement, un tel individu peut s’amener à remettre en question l’importance de sa vie. Ses buts dans la vie. On ne sort pas avec l’estime de soi intacte dans ce genre de situation. On sera traumatisé à jamais pendant ce moment qui s’apparente à de la torture. Les cicatrices seront indélébiles.

Pour pallier cette sinistre période, certains créent des bulles qui leur servent à remonter le temps, histoire d’aller farfouiller de beaux souvenirs d’actes romantiques dans la vie pré-confinement. On tourne vers la rumination. On rumine le passé, on le ressasse. Ça débouche sur deux aspects qui traduisent une existence aliénée. Soit on existe dans le passé, soit on imagine notre existence délocalisée. Notre imagination va s’efforcer de constituer le décor auquel ressemble la maison de l’aimé(e). Du coup, l’espace où on vit le confinement devient invivable. Distance physique, oui, mais à proximité étanche de la personne aimée. C’est donc une vie en suspension, une non-vie inhumée par l’absence. On n’a qu’un choix, celui d’un révisionniste qui s’enivre de flashbacks à prétention voluptueuse.


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