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Joseph Lambert reprend les commandes du Sénat

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Via Facebook/ JosephLambert

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Par Juno Jean Baptiste

Le sénateur Joseph Lambert est élu ce mardi à l’unanimité président du Sénat de la République, du moins ce qu’il en reste depuis que le président Jovenel Moïse s’est fendu d’un tweet maladroit, le 2e lundi de janvier 2020, à minuit pile, pour constater la caducité de deux tiers du Grand corps. Un retour aux devants de la scène pour le sénateur du Sud-Est, après une année d’une diète médiatique volontaire, stratégique peut-être.

L’homme fort du Sud-Est a récolté la totalité des voix: huit. Le président sortant Pierre François Sildor ne s’est pas porté candidat. La veille, lundi soir, lors d’une primaire en sa résidence, il n’a obtenu qu’une seule voix, quoique le président Jovenel Moïse ait remué ciel et terre pour le faire réélire au détriment de Joseph Lambert. Il faisait la gueule depuis et il s’est, en conséquence, brillé par son absence lors de l’élection. «Pierre François est un mauvais perdant», a confié un élu.

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Il faut dire que depuis quelques jours le sénateur Joseph Lambert était pressenti à ce poste. Dans l’ombre, l’ancien député, trois fois président du Sénat, l’un des plus expérimentés du bord de mer, multipliait les rencontres depuis peu. En coulisses, Joseph Lambert s’était montré déterminé à prendre les rênes du grand corps en remplacement du très mutique Pierre François Sildor.

Ce dernier est surtout connu comme l’un des fidèles sénateurs inféodés au pouvoir exécutif. Durant toute l’année de son mandat, Pierre François Sildor n’aura jamais pipé mot dans le débat public. Il n’aura existé que par son silence et cela a précipité le Sénat dans l’oubli et dans l’indifférence. Et c’est là tout l’enjeu du mandat de Joseph Lambert: changer la narration et faire exister le grand corps.

Jamais dans l’histoire contemporaine d’Haïti le Sénat, quoique aujourd’hui pourvu de seulement dix membres, n’a été autant menacé. Le pouvoir actuel, dans sa tentative illégale et inconstitutionnelle de changer la constitution, cherche à le supprimer. À coup de pseudos enquêtes d’une firme passée maître dans la manipulation, et d’autres messages circulant sur les réseaux sociaux, le Sénat est projeté comme l’incarnation du mal haïtien.

Le Sénat de la République est l’une des plus vieilles institutions de la République. Il a certes à plusieurs moments tâtonné. Il est même décrié au même titre que la Chambre des députés et du pouvoir exécutif. Mais il est toujours reconnu comme un rempart aux tentations autocratiques. Et en ces temps troublés par des crises multiples qui se profilent à l’horizon, il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain.

Le sénateur Joseph Lambert, habitué des rings les plus périlleux, est attendu au tournant. Il devrait forcément avoir son mot à dire dans le débat autour du changement de constitution que cherche à opérer un pouvoir PHTK comptant de multiples casseroles à ses basques, en plus d’être l’un des pouvoirs les plus corrompus de toute l’histoire d’Haïti.

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2021, plus que 2019 qui aura été polluée par les épisodes de pays lock et de massifs mouvements de protestation contre le pouvoir en place, risque d’être celle de toutes les turbulences, de toutes les convulsions sociopolitiques. L’opposition et d’autres forces vives de la nation attendent impatiemment la fin de mandat du très décrié président Jovenel Moïse le 7 février prochain. Ce dernier ne semble pas l’entendre de cette oreille.

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Selon nos informations, Jovenel Moïse redoutait réellement le retour de Joseph Lambert à la tête du Sénat. Il a toujours voulu être le seul coq chantant de la basse-cour, en démantibulant des institutions de la République (lire notre article et voir notre infographie sur la question). Il a plutôt souhaité la réélection de Pierre François Sildor, parce que malléable. Et dans ce contexte où lui et toute sa bande (ses conseillers, son comité consultatif et BRIDES) veulent éliminer Sénat, l’arrivée de Joseph Lambert aux affaires doit être pour eux une belle angoisse.

Le sénateur du Sud-Est a déjà ouvertement exprimé sa volonté de défendre le Sénat face à la machine infernale du PHTK d’opérer ce tour de force sur la loi mère, comme si celle-ci cristallisait tous les maux du pays et qu’il suffisait simplement de la changer dans l’ambition d’un meilleur pays. Le sénateur Joseph Lambert est heureux de retourner aux commandes. Pierre François Sildor s’en renfrogne. Et tout le Palais national ?


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