Fonds pour la recherche et le développement: «Tout projet de recherche peut potentiellement être financé», selon Ronald Gabriel
6 min readPar la Rédaction de Port-au-Prince Post
Le « développement » se révèle un long processus, un parcours sinueux, une construction permanente et non une œuvre achevée. Et au-delà des controverses axiologiques portant sur les modèles de référence, à quelques nuances près, certaines constantes demeurent. L’une d’entre elle consiste en la corrélation entre “recherche scientifique” et “développement”, ce qui appelle nécessairement toute une politique publique assortie de débours d’envergure. Dans le contexte du sous-développement chronique d’Haïti, la Banque de la République d’Haïti (BRH) vient de créer un Fonds pour la recherche et le développement, ce qui participe, probablement, de la corrélation sus-mentionnée. Ronald Gabriel, qui fait office à la fois de directeur général de la BRH et de directeur exécutif du FRD-BRH, est revenu sur l’initiative au cours d’une interview accordée à Port-au-Prince Post. L’interview.
Port-au-Prince Post: C’est quoi l’enveloppe budgétaire disponible ? Sur quelle période ? À quelle fréquence se feront les appels à proposition ?
Ronald Gabriel : Pour le démarrage du Fonds BRH pour la Recherche et le Développement (FRD-BRH), la BRH a fait une dotation initiale, mais la contribution de l’institution devrait être renouvelée sur une base plutôt régulière au moment de l’élaboration de son budget annuel. La Banque Inter-américaine de Développement (BID), un de nos partenaires dans le cadre de cette initiative, s’est engagée, en effet, à co-alimenter les ressources du Fonds et les procédures de décaissements sont en cours. L’approche du fonds commun (basket fund) adoptée est supportée également, en termes d’engagement pris, par le Ministère de l’Économie et des Finances, le partenaire naturel et institutionnel de la BRH dans l’élaboration des politiques publiques.
Pour ce qui concerne la fréquence des appels à proposition, le Fonds a défini pour le moment trois périodes de soumission d’une durée moyenne de 4 mois, soit un nombre de trois appels à proposition par année. Toutefois, cela dépendra dans une certaine mesure du volume de dossiers de candidature reçus et traités, et des décisions de la Direction Exécutive et du Conseil Scientifique du Fonds. A date, je peux vous confier que plusieurs dossiers ont déjà été soumis à travers le site, canal régulier des demandes de financement. Quelles que soient les décisions finales prises sur la période et la fréquence des appels à proposition, un effort substantiel de communication sera déployé pour rendre publique la marche des activités du FRD-BRH , la transparence étant l’un des principes cardinaux auxquels le Fonds est particulièrement attaché. Ces informations seront donc rendues disponibles sur le site du Fonds, via le compte twitter de la BRH ou dans les journaux le cas échéant.
Port-au-Prince Post: Quels sont les indicateurs objectivement vérifiables définis par la BRH en ce qui concerne les externalités positives du Fonds ?
Ronald Gabriel: D’abord, le fait que les projets de recherche puissent trouver à travers le Fonds le financement nécessaire pour être réalisés est une initiative structurante pour une société en quête de modernité qui aura ainsi l’opportunité de comprendre la nécessaire relation entre le développement et l’existence de « think thank », de laboratoires de Recherche et Développement, le développement n’étant surtout pas une question exclusive de moyens financiers. Le vœu maintenant est qu’effectivement cette action puisse aussi induire des externalités positives au-delà de l’activité de financement proprement dite.
En ce sens, plusieurs indicateurs peuvent être considérés ou même surveillés. L’engouement que notre initiative aura créé dans le milieu académique et universitaire pour la dynamisation des activités de recherche ; une augmentation dans la production et la diffusion de connaissances ; un renforcement de la banque du savoir indispensable au développement du capital humain, facteur important dans la fonction de production au service de la croissance économique ; une animation scientifique qui contribuera à relever le niveau du dialogue dans la communauté ; l’utilisation des résultats de ces recherches et études, comme outils d’aide à la décision, dans la conception, l’élaboration de politiques publiques, dans l’identification des filières porteuses et la mise en place de projets d’investissements pour le secteur privé, dans l’implémentation de solutions adaptées pour adresser nos multiples problèmes de société et notre mal développement. Autant de retombées concrètes attendues comme externalités positives de la création du FRD-BRH.
Port-au-Prince Post : Conjoncturellement, ce fonds peut-il encourager la recherche scientifique autour de la pharmacopée haïtienne ?
Ronald Gabriel: En principe, le Fonds BRH pour la Recherche et le Développement (FRD-BRH) a un intérêt particulier pour les recherches concernant les domaines liés aux politiques publiques et au développement du secteur privé mais généralement pour tout projet capable d’apporter des solutions et d’introduire des innovations. Ainsi, dans un pays avec autant de besoins mais souffrant d’un important déficit de ressources pour les financer, le Fonds envisage d’élargir l’éventail de ses filières prioritaires au rythme de l’expansion de sa capacité financière.
Dans ce contexte, le Fonds pourra donc, de façon conjoncturelle ou permanente, financer un projet de recherche qui ne tombe pas dans la catégorie des domaines prioritaires mais qui présente un intérêt scientifique et social certain pour la communauté. Par exemple, la crise sanitaire actuelle de la COVID-19 peut valablement justifier le financement par le Fonds d’activités de recherche qui trouvent leur application dans la pharmacopée haïtienne. Une décision pareille relève évidemment de la discrétion de la structure de gouvernance du Fonds qui analysera les demandes de financement, suivant des critères scientifiques établis, transparents et connus de tous. Ainsi tout projet de recherche peut donc potentiellement être financé, et nous invitons la communauté des chercheurs à soumettre leurs demandes de financement, quel que soit le secteur d’activités.
Port-au-Prince Post: En quoi la BRH entend-elle encourager les banques commerciales à emboîter le pas dans cette même dynamique de financement de la recherche scientifique ?
Ronald Gabriel : Pour le système bancaire, la BRH a une mission de régulateur. En ce sens, elle prend des dispositions visant à assurer le fonctionnement harmonieux des banques commerciales, le respect des normes règlementaires relatives au cadre de surveillance, avec pour responsabilité statutaire d’assurer en tout temps leur stabilité. La mission de la Banque Centrale ne l’autorise donc pas à influencer le choix des banques en matière d’activités à caractère social.
Néanmoins, aujourd’hui, avec autant de disparités, le pays a besoin de plus d’entreprises socialement responsables, s’impliquant dans la communauté et contribuant au bien public. Le chantier vers la construction d’une Haïti socialement juste, financièrement incluse et économiquement prospère est vaste, et les pouvoirs publics à eux seuls, tant au niveau national que local, ne peuvent y arriver dans un environnement aussi contraignant. Certaines entreprises haïtiennes ont des fondations qui apportent des contributions dans plusieurs secteurs. Quel que soit le canal utilisé, il serait souhaitable que les entreprises, au-delà du système bancaire, contribuent à l’édification d’Haïti, cette cathédrale qui nous est chère, que ce soit à travers le financement de la recherche ou d’autres activités ayant une finalité communautaire.
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