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Netty Duclaire, symbole de résistance et de bravoure

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Par Rosny Ladouceur

A 33 ans, elle incarnait la bravoure et  défendait bec et ongles la constitution de 1987. La militante féministe est morte exécutée dans son quartier de Christ-Roi.  Les hommages ne se taisent pas.

La machine à broyer des vies a encore frappé. Côté gauche : Une balle à la trempe, une à la mâchoire, une au bras ; côté droit : deux au bras, selon un rapport du Réseau national de défense des droits humains (RNDDH). Le robinet de sang coule encore sous l’œil passif du pouvoir en place, après les massacres perpétrés à La Saline et Bel-Air…   Marie Antoinette Duclaire, sommairement exécutée dans la nuit de mardi 29 à mercredi 30 juin, a fondu toute la toile en larmes. Elle militait, sur le béton comme au micro, contre la violence, les agressions physiques et sexuelles infligées aux femmes, elle luttait contre la corruption et et défendait bec et ongles la constitution de 1987. Netty, porte-parole de Matris Liberasyon (une structure politique de l’opposition), donnait des tournis aux acteurs politiques qui défilaient au «Break fast» de King Kino, dénonçait les dérives et les gabegies de l’Etat. Elle aimait Haïti et incarnait la bravoure, crachant tout haut ce que d’autres militants politiques ronchonnaient tout bas.

Son décès brutal, ainsi que celui de son confrère Diego Charles, journaliste à radio Vision 2000, a soulevé un raz de marée d’indignations : les autorités policières, elles, imputent la responsabilité de ce crime ignoble à Fantom 509, groupe de policiers syndicalistes qui exigent de l’institution de meilleures conditions de travail.

Marie Antoinette Duclaire allonge la longue liste des trentagénaires mangés crus par des bras armés grand jour grand midi. Comme aux temps des escadrons de la mort.

Les hommages ne se taisent pas. Pour son unique frère, la native des Cayes était un modèle de force, de courage, de détermination, de sagesse. On a assassiné Netty pour ses positions et ses convictions. Elle est morte dans la fierté et la dignité, a déclaré Fred Duclaire, prenant la parole au nom de la famille, une équipe solide et soudée dont il est le capitaine.
 
Armand Joseph Jules décrit Netty comme une femme débonnaire, attachante, sympathisante, forte de caractère, incorrigible dans ses convictions, inspirante, motivante et qui ne reculait pas devant les embuches. Elle combattait pour le changement des conditions de vie des masses, elle portait le projet politique de Matris Liberasyon dans son cœur avec véhémence et témérité. Avec Chantal Ociel, Netty était la force vive du parti qui se voulait rassembleur d’autres partis.

Netty, c’est l’amour, le partage. Quoique radicale dans ses prises de position publiques mais elle était conciliante, amicale et cherchait toujours un terrain d’entente. Au temps du pays lock, sa maison était un espace de débat politique, autour d’un verre. On parlait d’argent dilapidé, de statu quo, de vapeur à renverser, de redistribution équitable de richesses, s’est souvenu Valentina Morency.
 
Netty, née 31 octobre 1987 à Chantal, dans la périphérie des Cayes, où elle a bouclé ses études primaires et secondaires avant de rentrer à Port-au-Prince pour étudier l’anthropo-sociologie et les sciences juridiques à l’Université d’Etat d’Haïti, a co-animé plusieurs émissions de radio dont Viv Ayiti de radio Pacific, Ti bat Bouch de Radio Sans Fin. Co-Fondatrice et PDG de la plateforme multimédia LaRepiblik, elle fut, un temps, manager de Jean Jean Roosevelt, guitariste, artiste engagé qu’elle prenait sous son aile, accompagnait aux studios ou en tournée, qu’elle trainait sur tous les planchers pour jouer bénévolement face à des étudiants et des associations de la société civile.

« Qui me suivra à présent dans mes folies ? Qui écoutera mes musiques en premier ? Tu cirais mes chaussures avec tes châles avant de grimper la scène, tu me laissais à manger  après chaque concert, toute ta famille m’a accueilli comme un frère, tu fouillais toujours dans ma voiture, cherchant de l’argent, bouffant mes bonbons. Nos conversations téléphoniques ne prenaient pas fin. Elle assistait à mes conférences et partageait mes nuits blanches lors des concerts ». Le chanteur est effondré par la nouvelle de ce triste départ.

Pour Pascale Solages de l’organisation Nègès Mawon, c’est une sœur de combat qui est tombée sous les balles assassines de malfrats armés. « Sa vie fut un symbole de résistance, de combat sans relâche contre la corruption et les dilapidateurs des fonds Petro Caribe, participant depuis 2018 à tous les rassemblements des Petro Challengers, militant pour la justice sociale et le bien-être de chaque Haïtien ».  

Faubert Bolivar, comme beaucoup d’autres amis internautes terrassés par son assassinat horrible, voit dans une photo sur son profil Facebook tout le symbolisme de la résistance au clic PHTK : un mégaphone, une paire de tennis et des lunettes fumées, un chapeau de paille et un T-Shirt blanc où on lit ce message signé Matris Liberasyon : « Diktati, Non ».

C’est qu’elle s’échauffe à fouler le sol, le lendemain, pour manifester et crier son ras-le-bol devant la misère, la pauvreté des masses, les massacres en série, les inégalités sociales, l’injustice et l’impunité.

Netty sentait la mort la chevaucher, elle la voyait venir. Elle l’a frôlée à maintes fois. Sa maison a été criblée de balle une nuit de février 2021 par des individus circulant à moto. Mais refoulait l’envie de quitter le pays.


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