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Violence envers les femmes en Haïti : la jeunesse comme bouée de sauvetage pour changer la donne

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CP: Ticket Magazine

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Par Josianne Desjardins

À Port-au-Prince, deux journalistes veulent faire une différence dans la lutte contre les violences envers la gente féminine en outillant les jeunes, alors que les cas demeurent préoccupants et que la justice haïtienne peine à répondre à ce fléau.

Deux artisanes du quotidien francophone Le Nouvelliste Haïti, Gaëlle C. Alexis et Winnie Hugot Gabriel, ont créé le projet AJI Ansanm kont vyolans sou fanm ak tifi (Agir Ensemble contre la violence envers les femmes et les jeunes filles) grâce à l’appui financier de l’Ambassade américaine en Haïti. Leur initiative, qui consiste en un cours audiovisuel interactif, est une première du genre au pays. Les journalistes rejoindront ainsi quelque 500 jeunes de dix écoles à travers la capitale au cours des prochaines semaines.

« Il est impératif d’éduquer les gens sur cette problématique. De leur permettre d’appréhender les mécanismes de la violence et de les sensibiliser aux conséquences sur les victimes », estime Winnie Hugot Gabriel. Cette dernière est convaincue que l’éducation est le premier jalon pour un réel changement.

Celle qui est aussi avocate est consternée de côtoyer au tribunal des victimes qui, ayant eu le courage de dénoncer leur bourreau, sont trop souvent laissées pour compte. Car en fait, très peu de dossiers suivent leur cours (voir encadré). « C’est un drame de voir que la société et encore moins la justice n’arrivent pas à [les] protéger », déplore-t-elle.

À l’heure actuelle, le harcèlement sexuel n’est pas considéré comme une infraction en Haïti. « C’est un terme qu’on ne retrouve nulle part dans le code pénal, alors que beaucoup de femmes subissent des actes de harcèlement au travail ou dans d’autres milieux », souligne Winnie Hugot Gabriel.

Début d’année ardu

Seulement pour le mois de janvier, trois féminicides sont survenues. Sherley Montfort (20 ans), de Canapé-Vert (un quartier de la capitale), est morte après avoir reçu plusieurs coups de couteaux. Même scénario pour Jepheline Beauvoir, 25 ans, de l’île de la Gonâve et Derline Carénant, 26 ans, de Miragoâne. Dans les trois cas, leur conjoint a été arrêté, mais la justice n’a pas encore annoncé de suivi au moment d’écrire ces lignes. « Le système judiciaire, miné par des crises et des épisodes de grèves de toutes sortes, peine à apporter une réponse adéquate pour contrer les violences envers les femmes et les jeunes filles en particulier », souligne Mme Gabriel, qui estime qu’elles sont « doublement victimes » dans les circonstances.

Dans un autre registre, on rapporte régulièrement dans les médias locaux et réseaux sociaux des cas de femmes violées et torturées par des membres de gangs dans certains quartiers chauds de la capitale, tels que La Saline, Pont-Rouge ou encore Bel-Air.

Pour celles qui osent porter plainte, « l’accueil qui leur est réservé au niveau des commissariats est très souvent hostile, enchaîne Mme Gabriel. Dans certaines zones reculées du pays, les femmes victimes doivent parcourir de longues distances pour se rendre à un poste de police ou un tribunal de paix. Ceci ajoute au manque de confiance envers les autorités, [mais contribue aussi] à l’ignorance et la banalisation de la violence ».

C’est pourquoi les deux journalistes veulent faire connaître plus largement les procédures à suivre aux jeunes en cas de viol, par exemple. « Il arrive souvent que l’agresseur s’en sorte indemne, profitant du fait qu’un dossier est mal préparé et qu’il manque des pièces maîtresses, tel que le certificat médical [de la victime] », constate Mme Gabriel.

Mais au-delà de l’éducation, il est temps, plus que jamais, que la société entière soit mobilisée autour de cette bataille. Que les instances gouvernementales se mettent aux côtés des victimes, renchérit l’avocate et journaliste.

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Quelques chiffres

Plus de 25 % des haïtiennes âgées de 18 à 24 ans ont subi des rapports sexuels forcés avant l’âge de la majorité ; Environ 34% des femmes ont vécu diverses formes de violences émotionnelles ou sexuelles, exercées par leurs maris ou partenaires ; Près de 30 % des femmes et filles interrogées âgées de 15 à 49 ans ont été victimes de violence physique, depuis l’âge de 15 ans (selon les données de l’étude du Ministère de la santé publique haut et de la population en Haïti pour 2016-2017) À noter qu’en 2005-2006, le taux de violence physique se situait plutôt à 23%.

Source: Mémoire sur l’impunité des violences faites aux femmes et aux filles en Haïti. Rédigé par Avocats sans Frontières Canada, KAY FANM et l’Office de la protection du citoyen en février 2019


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